Plus qu’aucun autre cinéaste de sa génération, Nolan aura su « parler » au public. Le terroriser (The Dark Knight), le mystifier (Le Prestige), lui prendre la tête (Memento). Mais il n’avait jamais pleinement démontré sa capacité à émouvoir. Sans doute parce qu’il est d’un sérieux papal, son goût l’avait toujours poussé à collaborer avec des acteurs à sang-froid (Christian Bale) ou au front aussi soucieux que le sien (Di Caprio). Le casting de McConaughey en papa courage bravant les périls de l’espace pour l’amour de sa fille chérie emmène son cinéma dans une autre dimension, ouvertement émotionnelle. Sans doute celle à laquelle il aspirait depuis toujours. Il y a une scène proprement bouleversante au beau milieu du film, quand l’astronaute Cooper comprend vraiment ce que signifie la relativité du temps (une heure là où il est = sept ans sur Terre). Là, Interstellar s’arrime, pour ne plus jamais la lâcher, à l’expressivité renversante de McConaughey, son humanité folle de redneck au cœur d’or. La piste kubrickienne était définitivement un leurre.
Frédéric Foubert, premiere.fr