Quand on fait une brève radiographie des talents d’aujourd’hui qui éclaboussent le monde du cinéma aux quatre coins du globe, on pourrait citer par exemple Bong Joo-ho (ou Park Chan-wok) en Asie, Pablo Larrain en Amérique du Sud, Xavier Dolan un peu plus au nord, Andreï Zviaguintsev du côté de la Russie, ou encore Rodrigo Sorogoyen en Europe. En quelques années, le cinéaste espagnol s’est forgé une filmographie d’excellence qui en fait l’un des metteurs en scène les plus prometteurs et passionnants du vieux continent. Révélé en 2016 avec son troisième long-métrage, le polar âpre Que Dios nos Perdones, Sorogoyen avait confirmé son extraordinaire talent deux ans plus tard avec El Reino, thriller politique couronné de sept Goyas (l’équivalent des César en Espagne). Avec Madre, Sorogoyen prouve qu’il a cette capacité, souvent propre aux génies, de pouvoir s’attaquer et réussir dans n’importe quel genre. Après le policier ou le thriller, il s’essaie au drame à consonance tragique. Madre, ou l’histoire d’une mère dont le fils a disparu il y a dix ans sur une plage des Landes alors qu’il était en vacances avec son père. Depuis, Elena essaie de se construire, ou plutôt donne le change en survivant sur un équilibre très fragile.
(...) Rodrigo Sorogoyen a brillé dans le polar très noir. Il a brillé dans le thriller politique et il brille aujourd’hui dans la chronique dramatique. Et s’il brille à ce point cette fois-ci, c’est parce que le cinéaste prend complètement à rebrousse-poil tous les codes d’un genre dans lequel il semblait pourtant impossible d’inventer ou de réinventer.
Nicolas Rieux mondocine.net